Une question cash mais qui a son intérêt pour le patient. Un chirurgien plasticien âgé a t-il toujours la main ? Est-il au fait des dernières techniques ? C’est un peu ce qu’on se demande, sans toujours oser le faire. Eh bien j’ai eu ce culot !
Je remercie chaleureusement les deux spécialistes qui se sont prêtés au jeu de mon questions/réponses même si l’un d’eux a préféré témoigner de façon anonyme car il a, dit-il, « la coquetterie assumée de ne pas vouloir dévoiler son âge » (trop mignon). De fait, c’était un peu délicat d’aborder ce sujet avec eux. Mais le point ayant été soulevé à plusieurs reprises par mes lectrices, je me devais d’y apporter un éclaircissement.
Le cas qui revient le plus fréquemment : « J’ai été opérée, il y a 25 ans, par untel. J’étais très contente du résultat. Mais aujourd’hui, pour une autre opération, j’hésite … ». Alors, qu’en disent les principaux intéressés ? Ces patients ont-ils raison de s’interroger ? « Je l’ai moi-même eue plusieurs fois cette question et je la comprends parfaitement. Toutefois, si les patients ont raison de se la poser, ils n’ont pas forcément raison d’hésiter … » réplique le Dr Vladimir Mitz.
Y a-t-il une limite d’âge pour les chirurgiens pour opérer ?
Absolument aucune. Un spécialiste en pleine possession de ses moyens et toujours animé par son métier peut très bien opérer jusqu’à ses 80 ans et même au-delà. Aucune loi ne le lui interdit. La limite est simplement celle posée par les assurances, qui refuseront bien sûr de continuer à prendre en charge un médecin s’il accumule les casseroles.
Of course, un chirurgien âgé n’a pas le même rythme que ses jeunes et fringants collègues. Au lieu de réaliser 4 à 5 par interventions par jour par exemple, il n’en acceptera qu’une ou peut-être moins encore (généralement celles où son geste offre, selon, une vraie valeur ajoutée pour le patient sinon à quoi bon ?). Comme l’explique notre invité mystère : « Je suis très expérimenté en rhinoplastie primaire. Mais pour les rhinoplasties secondaires – corrections d’une première intervention, ndlr- , il y a plus spécialisé que moi. Je n’ai plus la vanité de dire que je sais tout faire ni la tentation de me lancer des défis ridicules alors, je n’hésite pas à réorienter les patients concernés vers des confrères plus qualifiés ». N’étant plus dans la course à la réussite, le chirurgien est clairement plus détendu. Il prend beaucoup plus de temps pour ses consultations et montre souvent aussi plus d’empathie envers son patient.
Un chirurgien âgé a-t-il toujours la main ?
C’est la première question que se posent les patients. Mais c’est ce qu’il y a de plus facile à vérifier. Vous prenez rendez-vous et constatez par vous-même !
« Ce qui fait peur aux gens surtout, c’est la main qui tremblote. Mais ça, en consultation, vous vous en rendez vite compte si le chirurgien remplit ou les conditions physiques et intellectuelles pour prendre en charge votre opération. L’âge physiologique et l’âge du passeport ne sont pas toujours corrélés. Personnellement, je fais du sport quotidiennement, je ne bois pas, je ne fume pas, je ne me suis jamais senti aussi en forme ! Et je suis surtout bien moins stressé que dans mes jeunes années. Comme disait le peintre Henri Matisse, « On ne peut pas s’empêcher de vieillir mais on peut s’empêcher de devenir vieux »» indique notre anonyme.
« L’autre point fort du chirurgien plus âgé, c’est qu’il a été confronté, au cours de sa carrière, à absolument toutes les situations et connaît par cœur les ficelles du métier. Il n’a pas le geste hésitant. Il travaille vite, ce qui est un très bon point pour le patient qui bénéficie en prime d’un temps d’intervention plus court, donc d’une récupération post-op plus facile. J’ai lu dans une récente publication que le taux de complications chez les chirurgiens d’un certain âge était d’ailleurs inférieur à celui des jeunes médecins … » enchaîne le Dr Vladimir Mitz. Et pour cause : un chirurgien qui a des dizaines d’années de pratique derrière lui sait parfaitement anticiper les risques.
Enfin, pour vous rassurer complètement, il ne faut pas oublier que le spécialiste ne travaille jamais seul au bloc. Si vous redoutez la main qui tremble, rappelez-vous qu’il est entouré de tout un staff : infirmières, médecin anesthésiste, etc. Donc, à la moindre défaillance, soyez sûrs qu’ils sauront écarter gentiment Papy, s’il sucre un peu trop les fraises. Et puis, tout de même, les bons chirurgiens ont une éthique ! Ils savent quand l’heure est venue de se retirer. Et si certains veulent jouer les prolongations, ils peuvent cesser d’opérer mais conserver une consultation de médecine esthétique à leur cabinet. On en a connu des comme ça qui ont occupé le terrain (toujours avec autant de succès qui plus est) jusqu’à leurs 90 ans !
Un « vieux » chirurgien est-il au courant des dernières techniques ?
Tout dépend de la personne à laquelle vous avez à faire, évidemment. Ne reste curieux que celui qui l’a été tout au long de sa vie ! En tous les cas, les chirurgiens de renom sont souvent à l’origine de techniques qui ont fait école, comme le Dr Mitz qui a découvert le SMAS, l’enveloppe qui recouvre les muscles et qui a amené à une toute autre façon de réaliser les liftings. La jeunesse continue donc de se former chez eux. Et leur curiosité envers les nouvelles techniques et technologies est insatiable. A tel point que beaucoup continuent de parcourir les congrès à travers le monde et de publier dans des revues scientifiques. Mais c’est sûr, on n’apprend pas à des vieux singes à faire la grimace. Quand on leur parle de « nouveautés », encore faut-il que c’en soient vraiment ! Ils ne s’emballent plus pour un rien.
Comment un chirurgien âgé peut-il me garantir un bon suivi à son patient ?
Ah, ça, c’est la question la plus importante selon le Dr Mitz. « Dans la plupart des interventions, le suivi court sur une année, il est facile de le gérer. Mais dans le cas d’implants mammaires, qui doivent être surveillés au long cours, il faut en effet pouvoir garantir au patient un relais sérieux avec un plus jeune chirurgien, qui connaît votre technique, le jour où vous prendrez votre retraite. C’est un vrai sujet, à mettre sur la table dès la première consultation donc» conclut le spécialiste.
Voilà. Je ne sais pas vous, mais personnellement, je suis à 100 % convaincue par les arguments. Je suis moi-même suivie par un médecin qui n’est pas un lapin de six semaines et dont j’apprécie énormément le recul, important pour freiner les ardeurs. Avec lui, je sais que je n’en ferai jamais trop. Alors, si la main a toujours la même virtuosité, je dis mille fois « oui » au papy chirurgien !
Les experts :
Dr Vladimir Mitz et notre invité mystère